Homélie Baptême du Seigneur (C)

Les lectures du dimanche qui clôt le temps de Noël:

https://www.aelf.org/2022-01-09/romain/messe

Quel est le sens du baptême de Jésus? Pourquoi descend-il dans le Jourdain? Quelle est la signification du baptême pour nous, deux mille ans plus tard?

Des rites

Des ablutions et des bains rituels il y en a, à peu près, dans toutes les religions. Aussi loin que l’on remonte dans l’Antiquité, on trouve des bains rituels un peu partout dans le monde. Aujourd’hui encore, on connaît le bain sacré des Hindous dans le Gange ou les Mikve pour les Juifs et les ablutions des Musulmans qui se lavent les mains, les pieds et le visage avant d’entrer dans la prière. Tous ces rites sont des rites de purification : la purification du corps symbolise la purification de l’esprit et la rénovation du coeur.

Que c’est agréable de prendre une bonne douche après avoir travaillé et transpiré. On sent bien que ce n’est pas simplement le corps qui est revigoré, on sent qu’on est un peu rénové. Cette réalité très simple, les religions l’ont appliqué comme une réalité qui signifie une réalité plus profonde.

En ce temps-là

Jean, l’ascète qui vivait dans le désert, a l’intuition que Quelqu’un vient après lui, envoyé par Dieu pour sauver son peuple. On est bien dans le contexte de l’attente messianique. Jean perçoit qu’il faut préparer le chemin à ce Messie. Il faut se préparer à l’accueillir. Pour cette raison, Jean propose à tous ceux qui le désirent ce baptême dans le Jourdain.

Une conversion

Cette plongée dans les eaux du fleuve est signe de conversion et de purification du coeur. Jean prêche la conversion des coeurs. Et, à vrai dire, il n’y va pas de main morte. Ce n’est pas une espèce de prédication à l’eau de rose. Convertissez-vous! Il est déjà là avec sa pelle à vanner… Les pailles, il va les envoyer dans le feu éternel. Aplanissez ses sentiers. Rendez droits les chemins du Seigneur. On avait entendu ces prédications de Jean pendant l’Avent. Dans cette prédication, Jean, vigoureusement, invite le peuple à se convertir pour se préparer intérieurement à accueillir Celui qui vient comme le Sauveur. Il les plonge dans l’eau.

Jésus devait-il être baptisé?

Et voici que Jésus s’avance au milieu de la foule et lui aussi descend dans le Jourdain. Moi je vous baptise avec de l’eau. Il vient, Celui qui est plus fort que moi, je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Jean est surpris. Il connaît Jésus mais il ne sait pas encore réellement qui il est. Il a cette intuition forte que Jésus est exceptionnel mais, à vrai dire, c’est tout à l’heure, quand la colombe descendra sur lui et que la voix se fera entendre du ciel, qu’il prendra conscience de qui il est. Mais Jean connaît suffisamment Jésus pour lui dire: Mais Seigneur, ce n’est pas à moi de te baptiser, c’est plutôt le contraire qu’on devrait faire. Tu n’as pas besoin de te convertir. Pourquoi Jésus descend-il dans le Jourdain? A votre avis, Jésus a-t-il besoin de se convertir? Jésus a-t-il besoin d’être purifié de ses péchés? Bien entendu que non… Mais Jésus veut prendre place parmi les pécheurs (quand il sera crucifié, il sera placé au milieu des malfaiteurs) pour prendre sur lui le péché du monde.

Un geste symbolique

Dans l’Evangile de Jean, on verra Jean le baptiste le désigner : voici l’Agneau de Dieu qui porte le péché du monde. Jésus veut prendre place parmi les pécheurs pour, en réalité, dissoudre dans les eaux du baptême tout ce péché. Pour le moment, c’est un geste symbolique et prophétique qui ouvre sa vie apostolique et sa prédication. C’est la première fois qu’on voit Jésus publiquement. Il était, jusque-là à Nazareth. Il était charpentier. Tout à fait inconnu ailleurs que dans cette petite bourgade de Galilée de quelques dizaines de personnes.

Une annonce de la réalité de sa mort

Jésus montre, par là, le geste qu’il fera plus tard. En effet, plus tard il descendra dans les eaux, non plus du Jourdain mais dans les eaux de la mort. Vous savez que, dans la Bible, l’eau a toujours deux significations. L’eau vive du salut, l’eau vive de la vie qui coule et puis il y a les eaux de la mort. La mer est le lieu de la mort et du péché. C’est pour cela que Jésus marchera sur l’eau mais il n’est pas dans l’eau. Cependant, le jour de sa crucifixion, il descendra avec les pécheurs dans cette mort qui est une conséquence du péché, lui qui est absolument pur et innocent. Mais, comme la Mer Rouge n’avait pas pu retenir les hébreux qui traversaient pour fuir l’Egypte, de la même manière, la mort ne pourra retenir Jésus. Il séjournera quand même trois jours dans le tombeau mais se relèvera dans la vie nouvelle. Au fond, toute la vie de prédication de Jésus est contenue entre ces deux réalités. D’une part le baptême dans le Jourdain qui signifie symboliquement cette ouverture du chemin et puis la mort et la résurrection de Jésus qui sera la réalité du chemin.

Plongés dans la mort pour ressusciter avec Lui

Si bien que, aujourd’hui, notre baptême à nous n’est plus seulement un baptême de conversion qui est symbolique (qui était le baptême de Jean le Baptiste) mais aujourd’hui, notre baptême est réellement un baptême dans le Christ. En vérité, nous mourons à cette vie mortelle pour renaître à cette vie immortelle (dans le chemin que le Christ a ouvert à travers la mort). Saint Paul dira cela magnifiquement. Vous avez été baptisés (c’est-à-dire vous avez été plongés dans les eaux du baptême) mais c’est dans sa mort que vous avez été plongés. La mort de Jésus c’est quoi? C’est son amour. Il nous a aimés jusqu’à nous donner sa vie. Il nous ouvre le chemin.

Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts.  Car, si nous avons été unis à lui par une mort qui ressemble à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection qui ressemblera à la sienne.

Epître aux Romains 6, 4-5

Il donne sa vie pour moi, pour toi, pour nous

Vous voyez, le lien entre le baptême dans le Jourdain et le baptême de Jésus dans l’Esprit-Saint et dans le feu (qui est sa mort). Aujourd’hui, sur les bords du fleuve le ciel s’ouvre. Plus tard, le rideau du Temple va se déchirer. Le lien entre Dieu et les hommes sera rétabli. Aujourd’hui, dans le Jourdain, Jésus reçoit l’Esprit sous la forme d’une colombe. A la croix, c’est Jésus qui rendra l’esprit. Poussant un grand cri, il remet l’Esprit. Père entre tes mains, je remets ma vie; cette vie donne-la à Jules, à Clémence, donna-la à Emma et à tous ces enfants et à ces adultes qui grandissent dans la foi et que tu m’as donnés.

Une reconnaissance

Aujourd’hui, au Jourdain, on entend la voix du Père qui dit: Tu es mon Fils bien-aimé. En toi je trouve ma joie. Le jour de la mort de Jésus sur la Croix, le silence est pesant. On entend juste Jésus crier: Mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné? C’est le silence du Père qui répond. Le silence du Père signifie l’abandon total de Jésus entre les mains de son Père. Il a tout donné. A l’Epiphanie, ce sont des païens qui sont venus reconnaître Jésus comme le Sauveur et au pied de la Croix, c’est un autre païen qui va le reconnaître comme le Fils de Dieu.

Aujourd’hui, au Jourdain, c’est la voix du Père qui désigne Jésus comme le Fils bien-aimé. A la Croix, silence du Père mais reconnaissance du bon larron: Jésus souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume et reconnaissance du centurion: vraiment cet homme était le Fils de Dieu.

Traverser la mer

Jésus a ouvert ce chemin. Et au fond, ces années de prédication au cours de sa vie publique, vont nous indiquer comment entrer dans ce chemin. Vous vous rappelez, quand les Hébreux ont quitté l’Égypte, ils ont traversé la Mer Rouge. Ils ne sont pas entré tout de suite dans la Terre Promise. Il leur aura fallu quarante année de désert avant de pénétrer dans la terre de la Paix que Dieu leur proposait. Aujourd’hui, nous sommes baptisés. Nous traversons la Mer avec le Christ dans la mort pour naître à la Vie éternelle.

Vivre de la vie éternelle

La vie éternelle ne commence pas à la mort. Elle commence au baptême. Mais nous avons encore toute cette vie terrestre pour préparer notre entrée définitive dans la Terre du Salut. Nous sommes déjà dans cette vie éternelle mais c’est le jour de notre mort que nous passerons définitivement le Jourdain pour entrer dans la Terre promise de la béatitude, de la plénitude du bonheur en Dieu.

Alors nous pouvons relire la magnifique Lettre de Paul à Tite.

Car la grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes. Elle nous apprend à renoncer à l’impiété et aux convoitises de ce monde, et à vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété, attendant que se réalise la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ. Car il s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes, et de nous purifier pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à faire le bien.

Lettre à Tite 2, 11-14

Un changement de vie

Ce baptême, cette grâce de Dieu qui vous a introduits dans la vie éternelle, dans la vie divine nous apprend à vivre d’une autre manière. Ce n’est plus seulement ce baptême de conversion de Jean-Baptiste qui n’était que symbolique. C’est une vie qui, pour nous est totalement changée. Nous ne sommes plus sous la loi du péché mais nous sommes sous la loi de la Vie. Nous sommes dans la loi de l’Amour de Dieu. Et si nous sommes encore pécheurs c’est pour que nous puissions, sans cesse, redécouvrir cette grâce baptismale à travers le sacrement de la Pénitence et de la Réconciliation. Lorsque Dieu, notre Sauveur, a manifesté sa Bonté et son Amour pour les hommes, il nous a sauvés non pas à cause de notre justice ou de nos actes mais par sa Miséricorde. Par le bain du baptême, il nous a fait renaître.

Une mission de consolation

Reprenons alors la première lecture. En réalité, ce n’est pas nous qui avons reçu le double c’est le Christ pour des fautes qu’il n’a pas commises mais qui les a prises sur lui.

Consolez, consolez mon peuple,

– dit votre Dieu –

    parlez au cœur de Jérusalem.

Proclamez que son service est accompli,

que son crime est expié,

qu’elle a reçu de la main du Seigneur

le double pour toutes ses fautes.

Isaïe 40, 1-3

Oui notre mission, c’est de baptiser. Notre mission c’est de consoler le monde désorienté qui ne connaît pas cette paix. Ce monde est encore dans les ténèbres de la mort. A nous de consoler ce monde en lui proclamant que son crime est expié. Notre monde soit-disant libéré et terriblement culpabilisé doit entendre cette grâce de Dieu qui a été manifestée dans le Christ. Une voix proclame dans le désert: Préparez le chemin du Seigneur, tracez droit dans les terres arides une route pour notre Dieu. A nous de tracer cette route pour le Seigneur. A nous de préparer ces chemins dans le coeur de nos contemporains (parfois très proches de nous, nos enfants, nos voisins, nos collègues,…) Il faut poursuivre la mission de Jean le Baptiste. Elève la voix. Ne crains pas. Dis aux villes de Juda, dis aux villes du monde entier : voici votre Dieu, voici le Seigneur Dieu. Il vient avec puissance et son bras lui soumet tout. Son bras de berger nous rassemble. Il nous porte sur son coeur. Demandons à saint Jean-Baptiste la force et la vigueur des prophètes dont le monde d’aujourd’hui a tant besoin.

Voici un reportage sur la vie d’adultes en chemin vers le baptême. L’appel décisif est une des ultimes étapes avant de recevoir les sacrements du Baptême, de la Confirmation et de l’Eucharistie. Cette célébration a lieu tous les premiers dimanche de Carême dans tous les diocèses du monde.

Demain, 10 janvier 2022, nous serons le lundi de la première semaine du temps ordinaire. Bonne semaine…