Homélie du premier dimanche de l’Avent (année B)

Ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! 

Evangile selon saint Marc 13, 37

Pour découvrir les lectures du premier dimanche de l’Avent année B (29 novembre 2020) :

https://www.aelf.org/2020-11-29/romain/messe

Dans une année liturgique, il y a trois grands mouvements qui expriment une véritable symphonie : Noël, Pâques et le temps ordinaire. A y regarder de plus près, chacun de ces temps est orienté par l’une des trois vertus théologales de foi, d’espérance et de charité.

Temps ordinaire, temps de la croissance de la charité

Nous le savons bien, le temps dit « ordinaire » n’a rien d’ordinaire. La couleur liturgique qui est associée à cette longue période, c’est le vert. Le vert de la croissance, de l’espérance. Pour ma part, il est d’abord le temps de la charité. Il s’agit de mettre en oeuvre au quotidien l’amour si bien illustré par le programme proposé par Jésus dimanche dernier: Ce que vous avez fait aux plus petits d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait. Le temps ordinaire, c’est le temps de la charité de l’Eglise. C’est vraiment l’aujourd’hui de Dieu, l’aujourd’hui de l’Evangile.

Carême et Pâques pour éprouver notre foi

Le Carême et le temps de Pâques sont pour moi davantage le temps de la foi. C’est un temps qui nous invite à croire sans réserve en la victoire du ressuscité sur le mal et la mort. Si les catéchumènes sont (normalement) baptisés à Pâques c’est pour nous rappeler qu’il s’agit pour eux et pour nous de plonger aux sources de notre foi. Et Dieu attend de nous une foi audacieuse.

Avent et Noël, le temps de l’espérance

Vous l’aurez compris, le temps de l’Avent et de Noël est tout orienté vers l’espérance. En ce mois de novembre finissant, en plein confinement, on se rend compte combien nos contemporains (et nous-mêmes) avons hâte de tracer sur notre horizon, une petite lueur d’espoir. Nous qui avons tant été privés de perspectives. Nous qui avons, plus que jamais, pris conscience de notre fragilité et de notre mortalité, nous nous prenons à vouloir espérer, à nouveau, dans ce que pourrait nous apporter ce petit enfant de l’étable de Bethléem. Nous aurons, sous les yeux, le mystère de l’humilité et de la petitesse de Dieu, qui se donne à nous sans s’imposer.

L’humilité de Dieu

Les contraintes liées à la pandémie que nous subissons sont peut-être pour nous l’occasion de réfléchir au véritable sens du mystère de Noël. Qu’est-ce qui est le plus important? Noël, c’est Dieu qui se livre entre nos mains. Un Dieu emmailloté dans une mangeoire se donnant à nous, sans défense, sans violence. Se laisser émouvoir par le mystère de la fragilité peut vraiment faire renaître l’espérance du monde. Dieu vient allumer, dans notre nuit, une étincelle de vie. A Bethléem, c’est bien la fragile vertu d’espérance qui fraie son chemin pour illuminer la nuit des temps.

On sait combien l’espérance est fragile et facilement remise en question. Faire une crise d’espérance est vraiment dangereux pour notre vie. Cela peut même mener à la mort. L’espérance est donc de tous les combats. Alors que nous nous préparons à célébrer la fête de Noël dans des conditions différentes, demandons à Dieu qu’il nous trouve prêts et en tenue de service quand il viendra. Que cette espérance puisse soulever le monde dans le quotidien qui est le nôtre.

En accueillant le chant qui suit, laissons le mot ‘humilité’ résonner en nous. Accueillons-le. Et reconnaissons ce qu’il peut porter de déstabilisant, d’inconfortable et aussi ce qu’il laisse entrevoir comme invitation, comme douceur du don…

Un chant de communion reprenant la prière de saint François
sur l’humilité de Dieu, chemin d’incarnation…




Le poète a toujours raison:

Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’espérance.

Et je n’en reviens pas.

Cette petite espérance qui n’a l’air de rien du tout.

Cette petite fille espérance.

Immortelle.

Car mes trois vertus, dit Dieu.

Les trois vertus mes créatures.

Mes filles, mes enfants.

Sont elles-mêmes comme mes autres créatures.

De la race des hommes.

La Foi est une Épouse fidèle.

La Charité est une Mère.

Une mère ardente, pleine de cœur.

Ou une sœur aînée qui est comme une mère.

L’Espérance est une petite fille de rien du tout.

Qui est venue au monde le jour de Noël de l’année dernière.

Qui joue encore avec le bonhomme Janvier.

Avec ses petits sapins en bois d’Allemagne couverts de givre peint.

Et avec son bœuf et son âne en bois d’Allemagne. Peints.

Et avec sa crèche pleine de paille que les bêtes ne mangent pas.

Puisqu’elles sont en bois.

C’est cette petite fille pourtant qui traversera les mondes.

Cette petite fille de rien du tout.

Elle seule, portant les autres, qui traversera les mondes révolus.

Comme l’étoile a conduit les trois rois du fin fond de l’Orient.

Vers le berceau de mon fils.

Ainsi une flamme tremblante.

Elle seule conduira les Vertus et les mondes.

Une flamme percera des ténèbres éternelles.

CHARLES PÉGUY, Le porche du mystère de la deuxième vertu