Troisième dimanche de Carême
Évangile selon saint Marc (Mc 11,15-17)
15 Ils arrivèrent à Jérusalem, et Jésus entra dans le temple. Il se mit à chasser ceux qui vendaient et qui achetaient dans le temple; il renversa les tables des changeurs, et les sièges des vendeurs de pigeons;
16 et il ne laissait personne transporter aucun objet à travers le temple.
17 Et il enseignait et disait: N’est-il pas écrit: Ma maison sera appelée une maison de prière pour toutes les nations? Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs.
Le Christ chassant les marchands du temple de Rembrandt, peint en 1626, est une huile sur bois de petite taille (43 cm x 33 cm). Le tableau fait partie des collections du Musée des Beaux-Arts Pouchkine à Moscou.
L’histoire de l’œuvre
Le Christ chassant les marchands du temple représente un passage précis du Nouveau Testament:
C’est une des premières œuvres de Rembrandt (1626). Il a vingt ans lorsqu’il peint cette toile.
Quelques pistes pour regarder et méditer sur «Le Christ chassant les marchands du temple»
Le format très réduit de l’œuvre (43 x 33cm) focalise l’attention sur les personnages.
Aucune profondeur, seul la colonne derrière le Christ nous permet d’imaginer que nous nous trouvons dans le Temple.
Les personnages forment une diagonale qui descend du Christ. L’alignement des personnage coupe l’espace en deux. D’un côté se trouve celui qui peut se lever pour fuir, et de l’autre trois personnages surpris, «cloués» à la table et à l’argent qui ne peuvent échapper à la colère du Christ.
Le Christ semble surgir du néant. Il tient dans sa main droite un objet. On peut imaginer un fouet, mais le peintre n’a pas jugé nécessaire d’en mieux cerner les contours. Du coup, la violence et la colère s’expriment par les mouvements du Christ et par son visage: front plissé, regard courroucé. il dessine un mouvement qui part de l’extérieur du tableau vers l’intérieur. Tout ce que nous voyons, les personnages, la table, l’argent va être balayé pour ce puissant mouvement du Christ.
Les différents personnages expriment une palette de sentiments:
• la surprise (avec le personnage qui se retourne, les yeux écarquillés, la bouche ouverte et qui tente -d’un mouvement du bras gauche- de récupérer l’argent sur la table et de se lever pour fuir);
• la cupidité (avec le personnage du premier plan, de profil et dont nous ne voyons pas les yeux, tout affairé à récupérer l’argent sur la table; il est comme totalement absorbé par l’appât du gain et ne voit pas le coup qui le menace);
• la peur (le personnage le plus proche du Christ part en fuyant, son argent sur l’épaule. On entend presque son cri) ;
• la terreur (l’homme en armure qui protège son visage, et ne peut plus fuir; c’est évidemment assez cocasse de voir un homme surprotégé se décomposer ainsi devant le Christ).
Les mains en disent long sur les sentiments des personnages: toutes sont fermées à part celle de l’homme en armure qui, face à la menace, a tout lâché. Les mains parlent autant que les visages et trahissent leur propriétaire.
Et puis, il y a ce petit détail. En haut à droite, dans le panier, dépasse la tête d’un coq ou d’une poule. Comme un signe précurseur de la trahison.
Tout la toile est rythmée par un jeu de voilement/dévoilement, caché/montré. L’argent n’est partiellement visible que sur la table, mais les sacs attestent de sa présence à travers tout l’espace de la toile. Les bras participent du même jeu, tantôt visibles (comme chez le personnage du premier plan ou le Christ) tantôt «retractiles» comme chez le personnage tentant de se lever au premier plan et dont les manches permettent un jeu entre l’intérieur et l’extérieur, le visible et l’invisible.
Enfin, la lumière venant de la gauche, en haut, s’abat sur la scène, dévoilant les gestes des personnages. Elle révèle aussi les plis des tissus qui trahissent une frénésie de mouvements. Seules la colonne du fond et la table donnent une stabilité à la scène.
Bruno Fuglistaller sj
Il y a des colères qui peuvent être des caprices. Mais il existe aussi des « saintes colères », des colères qui témoignent que l’on n’est pas indifférent aux choses importantes. Dieu ne se met pas en colère pour rien. Presque toujours, la colère de Dieu s’exprime quand le respect de l’homme est bafoué. Ce qui met Dieu en colère, selon la Bible, c’est essentiellement le spectacle de l’injustice ou de la brutalité de l’homme. Oui, il peut y avoir de la colère du côté de Dieu…